Vale kc plateau

ACCORD VALE : UNE TRANSITION OBLIGÉE ?

(Article mis à jour le 26/03/2021)

 

ACCORD VALE : UNE TRANSITION OBLIGÉE ?

L'accord avec Vale, effectivement historique à certains égards, soulève toutefois beaucoup d'interrogations auxquelles il conviendra de répondre. 
LINDEPENDANT-KNC propose ici en toute modestie quelques pistes de réflexions.

UN ACCORD À REMANIER DANS QUELQUES ANNÉES ?

- La production de « nickel qualité batterie » est temporaire : si l’avenir proche est manifestement au boom de cette alternative au moteur à explosion, deux virages sont déjà pris :

     a) le moteur à hydrogène progresse à grands pas. Paris par exemple vient de s’équiper de 600 taxis à hydrogène, et vise 10 000 à terme. Tesla nous informe d’ailleurs dans son MoU qu’il explorera également les opportunités de génération et de stockage d'énergies renouvelables : il s’y emploiera chez nous, ce qui est bien, mais à terme l’hydrogène devrait rendre inutiles les grosses batteries électriques, et Tesla s’y prépare. A nous de le faire également.

     b) les batteries vont, en attendant, évoluer pour devenir plus abordables. Tesla affirmait encore fin février pouvoir prochainement se passer de nickel, et s’il y a bien sûr une part de bluff, il n’empêche que le type d’alliage de nickel actuel, et donc notre procédé, seront probablement remis en cause à terme.

- Les résultats de l’ultime consultation pourraient rebattre des cartes, car si le pays accède à l’indépendance, il est probable que les exigences exprimées récemment se feront plus pressentes : intervention d’un spécialiste en hydrométallurgie pour développer des procédés permettant au pays d’aller davantage jusqu’au produit fini avec de plus grands bénéfices. Restrictions plus sévères sur les exportations de minerai qui dilapident notre richesse. Contrôle plus avancé du pays sur ses industries, etc.
Si jamais le « non » l’emportait, notre « capacité de nuisance » (comme disait Mitterrand à J.-M. Tjibaou) reste forte pour contrer d’autres abus et risques.

- En septembre 2024, un « bilan des résultats industriels et financiers » est prévu, qui pourrait amener à de « nouveaux partenariats industriels » … et donc au retrait d’anciens ?


UN
ACCORD « RAISONNABLE », PLUS FAVORABLE POUR LA CONSULTATION ?

- Nous n’avons pas eu besoin de la France pour négocier entre nous : c’est un point important qui témoigne de notre capacité à nous diriger seuls, et rassure les indécis.

- Un indépendantiste a joué positivement le rôle de fédérateur et d’arbitre, tout un symbole : les tenants du « oui » gèrent le congrès, et ont des personnalités reconnues qui peuvent avoir un rôle efficace de médiation. La encore, l’image nous est favorable.

- Il ne manque guère de signatures sur le document : l’unité a prévalu sur l’essentiel, et l’essentiel était l’unité ! Des divergences graves et l’échec des discussions auraient eu de fâcheuses conséquences pour préparer la 3ème consultation, dans un contexte de crise aggravée par le chômage des travailleurs de Vale dont nous aurions été tenu responsables par certains, y compris des notres.

- La crédibilité de l’activité nickel comme secteur positif pour l’indépendance regagne du terrain, d’autant que le prix du Nickel est au plus haut, et que nos entreprises (notamment celle en Corée) gagnent maintenant (beaucoup) d'argent.

- Les indépendantistes évitent une crise interne grave, et restent soudés sur l’essentiel, contrairement aux tenants du « non » : Calédonie Ensemble ne s’est pas associé à cet accord. Il nous reste à espérer une mise sur rails rapide et efficace du gouvernement !
 

DES AVANCÉES GRÂCE À LA LUTTE, MAIS DES QUESTIONS À SURVEILLER ?

- Le principe de la maîtrise de ses terres par le pays est quelque peu affermi : les titres miniers seront juste loués / amodiés contre une redevance estimée entre 0.5 et 2 milliards F CFP par an. Reste à maitriser la durée, notre capacité de récupération éventuelle de ces titres, et les montants des redevances.

- Les précautions environnementales sont augmentées et crédibilisées, ce qu’exigeaient tous les adversaires de la vente, avec aussi bien sûr le maintien du Pacte du grand sud et du projet Lucy ; un développement conséquent et rapide d’énergie solaire est aussi prévu (30MW) ; l’ensemble ne doit pas être différé par manque de financement.
Et si le quasi soulèvement généralisé de l'USUP a provoqué bien des sueurs froides pour nos emplois, il en a peut-être créé de salutaires chez certaines multinationales, du style Vale, Trafigura, Nornickel 
et autres, déjà épinglées et combattues ailleurs,  ainsi averties qu'ici les populations veulent être très vigilantes.


- L’idée d’un actionnariat pays conséquent voire majoritaire « bloqué » a fait son chemin chez une Droite qui ne jurait auparavant que par le sacro-saint libéralisme capitaliste. Reste à voir quelle minorité de blocage nous pourrions avoir, dans un montage qui peut facilement basculer vers une majorité extérieure (via quelques petits actionnaires - ou simplement la présidence du CA ?).

- Le montage financier semble ne pas faire payer directement et pour l'instant l'actionnariat Calédonien, mis à part les actionnaires employés. Mais reste à voir qui payera et comment s'il y a des déboires à l'avenir

- M. Beurrier s’en va ? Pas sûr, les termes sont ambigus : sa CFP (Compagnie Financière de Prony) reste, à 30 %. Début mars, elle était censée se composer d'un actionnaire majoritaire, la Société « Manco » (=?!), et « Sans Antonin Beurrier » : dans Manco ou dans CFP ??
Fin mars, ce n'est plus Manco mais "Agio Global ltd", laquelle n'est plus qu'à 49%, car 51% reviennent à 10 cadres de Goro Resources !
CFP detiendrait de plus seule un droit de véto sur toutes décisions (industrielles et stratégiques, financières et commerciales). 

- Les militants emprisonnés (ou en passe de l’être), qui ont lutté durement contre l’usine, ne sont pas abandonnés, voire quelque peu réhabilités. De fait, ils ne sont pas allés voler des biens pour s’enrichir, mais ont risqué la prison pour une idée politique de refus de cette usine. Notion certes rejetée par certains, mais comprise par d’autres : leur action s’appuie notamment sur des résolutions de l’ONU spécifiant que les populations indigènes doivent au préalable consentir à ce qui se fait sur leurs terres ancestrales, et ce n’était clairement pas le cas.
Des voies judiciaires sont possibles, via le juge d’application des peines, et l’on peut espérer que les magistrats du parquet ne feront pas dans l’acharnement.


… ET DES FRUSTRATIONS ET INQUIÉTUDES QUI RESTENT NOMBREUSES.

- Trafigura reste : c’est une des principales crispations des militants.
Le sulfureux trader était sans doute difficilement contournable : d’une part, il a été acté par l’appel d’offres, ce qui le rend délicat à déboulonner (c’était le but de leur manœuvre), et d’autre part le projet manque cruellement de fonds, ce qu’apporte Trafigura … moyennant des retours :
    Le remboursement, prioritaire sut toute distribution de dividences, de ses apports se fera avec une plus value de 50% ! 
   Il sera l’intermédiaire unique qui vendra le nickel de Goro Resources (à Tesla, à ... Vale et d'autres), avec une commission évaluée à 1.5 milliards F CFP / an. 


Ainsi, la coalition qui écartait des Korea Zinc ou autres Glencore, prêts eux aussi à payer, a fait le forcing pour gagner sur ce point. C’est très probablement que Valé ne souhaitait pas vraiment qu’un procédé hydrométallurgique puisse aboutir en NC alors qu’eux avaient échoué, d’autant que le produit fini leur ferait alors concurrence. Pour autant, que le NHC devenu seul produit aille directement à Tesla est sans doute un échec pour eux, quand ils espéraient le voir arriver dans leur propres usines d’affinage. A moins qu’il y en ait assez pour eux … et il y a sûrement d'autres enjeux à découvrir.

- Le schéma actionnarial nous laisse une majorité de façade à 51/49 ; nous avons acté ce point dans le positif, compte tenu du chemin parcouru par la Province Sud.
Pour autant, sur 8 administrateurs, 4 seront « à répartir entre CFP et Trafigura », lesquels auront manifestement une porosité, puisque peu avant l’accord, Trafigura déclarait ne pas vouloir siéger et confier sa représentation à … M. Beurrier, donc à CFP.
En cas de partage de voix, qui aura la majorité ? Qui sera président du CA ?

- Le "Pacte d'Actionnaires", sorte de règlement intérieur, qui définit, au delà des majorités d'actionnaires, qui commande quoi, semble redoutable, mais nous n'avons pas à ce jour pu en obtenir le texte... ce qui augmente la suspicion bien sûr.
Il semble que CFP pourra dès septembre 2024 vendre ses actions sans aucun droit de regard des autres actionnaires sur la vente ou le repreneur. Inversement,
 la SMPSC devra être autorisé par CFP / Trafigura pendant 10 ans pour toute vente d'action.

- Les titres miniers risquent de n’être la propriété du Pays que sur le papier : si nous les louons sur « longue durée », par exemple 99 an (?!), cela s’apparente à une vente déguisée.

- Les redevances à venir (location des titres, etc) risquent d’être symboliques, car l’accord borde clairement les possibilités en mettant en garde sur la viabilité économique du projet et la confiance des préteurs (Titre III, dernier paragraphe), pour ne pas sous entendre une mise en cause de la légalité de ces redevances dans le contexte actuel d'exemptions tous azimuts.

- Il nous reste à concrétiser dans le futur l’arrivée d’un spécialiste de l’hydro métallurgie, possibilité évoquée pour 2024 seulement, après un bilan des résultats industriels et financiers.

- Rien n’est dit sur les exportations de minerai brut refusées par l’USUP mais prévues dans le projet initial de Vale NC.
Le modéle de production aurait été testé ("stressé" dans le language économique) et serait viable, sans exportation de saprolites, jusqu'à un prix du Nickel au LME de 12 000 USD / Tonne, le marché prévisionnel étant pronostiqué à 17 500 USD en moyenne ces prochaines années.

- Tesla semble peu apte à la « valorisation optimale » de notre minerai annoncée, car il ne s’agit pour eux que de fournir leurs usines, et d’affiner donc le procédé qui amène au NHC compatible batteries, et non pas de poursuivre l’affinage du NHC en produit autre plus abouti et donc plus valorisé, ce qui était visé avec Koréa Zinc ! 
Dire que « d’autres partenariats industriels pourront être recherchés » est insuffisant.

Après bien des révoltes difficiles, les indépendantistes ont pris l'habitude -obligée- d'avancer pas à pas, sur le temps long.
Mais ils progressent.

 

Goro Vale NIckel ICAN USUP FLNKS Tesla Trafigura

Ajouter un commentaire